S’Adapter aux Changements Climatiques
Cet article rédigé par Dr. Reynold Bergen, directeur scientifique du BCRC, a été publié dans l’édition du mois d’avril 2022 du magazine Canadian Cattlemen et il a été publié à nouveau dans le blogue du BCRC avec l’autorisation de l’éditeur.
J’avais une affiche du National Geographic « Mammifères de l’ère glaciaire de la toundra de l’Alaska » sur le mur de ma chambre quand j’étais jeune. On y voyait des troupeaux de bœufs musqués, de chevaux, de loups, de lemmings, d’ours, de lions, de mammouths, de chameaux, de tigres à dents de sabre, de mastodontes et d’humains se déplaçant sur une vaste étendue herbeuse il y a de cela 12 000 ans. Les bœufs musqués, les ours, les loups et les lemmings vivent toujours en Alaska. Les lions, les chameaux et les chevaux se sont déplacés à d’autres endroits du globe, où le climat leur convenait davantage. Les tigres à dents de sabre, les mammouths et les mastodontes ont disparu. Lorsque les archéologues ont trouvé les restes gelés de ces animaux, ils ont fouillé davantage et ont découvert des fossiles de dinosaures à bec de canard datant de millions d’années auparavant, quand les conditions étaient chaudes et tropicales.
Le climat de la Terre est en constante évolution. Les volcans, les tourbières, le sol et les animaux produisent des gaz à effet de serre et les végétaux et les océans les absorbent. Depuis l’industrialisation, la combustion de combustibles fossiles par les humains a produit des gaz à effet de serre plus rapidement que l’environnement naturel peut les séquestrer. Les modèles climatiques prédisent la manière dont les niveaux de gaz à effet de serre changeants auront un impact sur les températures globales futures et les régimes de précipitation.
Les modèles climatiques ressemblent aux modèles économiques – les deux sont continuellement mis au point et améliorés alors que de meilleures données deviennent disponibles et les deux sont sujets au « bruit » qui masque temporairement les tendances à long terme. Les prévisionnistes économiques considèrent les données historiques et actuelles d’une industrie ainsi que l’économie globale pour prédire des tendances futures. Des circonstances imprévues comme l’ESB ou une pandémie causent d’importantes perturbations à court et à moyen terme qui pourraient faire penser que le modèle économique ne fonctionne plus. Mais au fil du temps, les tendances à long terme ressortent (p. ex., des tendances vers une consolidation agricole avec des entreprises pharmaceutiques et d’équipement, des fermes, des parcs d’engraissement, des transformateurs et des détaillants moins nombreux, mais plus grands). De manière semblable, les volcans, l’atténuation solaire ou les phénomènes météorologiques cycliques El Niño ou La Niña peuvent temporairement masquer les tendances climatiques à long terme. Même si nous n’aimons pas vers où les tendances s’orientent, mieux les comprendre peut nous aider à réagir adéquatement.
En 2020, les chercheurs d’Agriculture et Agroalimentaire Canada Vern Baron (Lacombe) et Gilles Bélanger (retraité) ont coécrit le chapitre « Climate, Climate-Change and Forage Adaptation » dans un livre intitulé « Forages : The Science of Grassland Agriculture, Volume II (septième édition). » Ce chapitre couvrait beaucoup de terrain, mais voici ce qui sortit du lot selon moi.
D’ici le milieu du siècle, les modèles climatiques prédisent que les provinces canadiennes seraient en moyenne 1 à 3oC plus chaudes qu’en ce moment. Cela ne semble pas beaucoup, mais ce n’est pas tout. De l’air plus chaud signifiera des sols plus chauds, ce qui pourrait être bénéfique pour certains végétaux, mais stressants pour d’autres. La variabilité météorologique augmentera également. L’air plus chaud et les courants océaniques peuvent altérer les courants jet et les régimes de précipitations. Les provinces de la C.-B., de l’Ontario, du Québec et de l’Atlantique au Canada devraient devenir plus humides avec plus de précipitations sous forme de pluies importantes survenant pendant la saison de croissance. Il est attendu que les Prairies reçoivent moins de précipitations, avec la majorité des précipitations tombant à l’hiver et au printemps. La saison de croissance sera plus chaude et plus sèche, avec possiblement deux semaines de températures au-dessus de 28 oC plutôt qu’une. Le Canada aura plus de journées sans gel et les zones de prairies devraient graduellement s’étendre plus au Nord et à l’Est dans des endroits des prairies et de l’Ontario qui sont boisés à l’heure actuelle.
Le dioxyde de carbone est un nutriment pour les végétaux, donc des niveaux de CO2 plus élevés peuvent aider les végétaux à se développer et à utiliser de l’eau plus efficacement. Si les températures sont trop élevées et/ou si l’humidité est limitante, les végétaux ne pourront tirer profit des niveaux de CO2 élevés. En général, il est attendu que la productivité fourragère augmente dans l’est du Canada et diminue dans les prairies.
Mais par une ironie du sort, le « réchauffement climatique » pourrait accroître le risque de mortalité à l’hiver. Prenez la luzerne comme un exemple. Alors qu’une plus grande proportion d’humidité au printemps pourrait améliorer la germination de la luzerne dans l’Ouest du Canada, une saison de croissance plus chaude et plus sèche pourrait compliquer la tâche pour ces jeunes plants d’établir des racines saines et de survivre à long terme.
Il sera donc encore plus important de s’assurer que la luzerne persiste bien dans des peuplements fourragers établis. Mais si des conditions plus chaudes et plus sèches signifient que la luzerne est le seul fourrage vert restant à la fin de l’été et à l’automne, la pression du pâturage pourrait augmenter. Le surpâturage affaiblit la luzerne et la rend plus susceptible aux maladies et à la mortalité à l’hiver. Moins de précipitations de neige partout au pays pourraient laisser la couronne du plant exposée et accroître le risque que la luzerne disparaisse du peuplement. Des moments chauds périodiques à l’hiver pourraient faire en sorte que les plants de luzerne perdent leur dormance et gèlent fatalement lorsque les températures hivernales plus froides reviennent. Ce ne sont pas de nouveaux problèmes, mais les changements climatiques les empireront et rendront les pratiques appropriées de régie et de pâturage encore plus importantes qu’elles ne le sont déjà.
J’aurais souhaité que ces défis aient pu être résolus en optant pour des fourrages qui poussent déjà dans des endroits chauds et secs (comme dans le sud-ouest des É.-U.) et de les semer dans l’Ouest du Canada ou en semant des fourrages provenant d’endroits chauds et humides (comme dans le sud-est des É.-U.) dans l’Est du Canada. Mais cela ne fonctionnera pas. Les végétaux sont très sensibles à la longueur de la journée. Les plantes vivaces qui poussent bien au sud, où la longueur de la journée est plus uniforme tout au long de l’année, pourraient ne pas survivre plus au nord, où les journées deviennent rapidement beaucoup plus longues à l’été et plus courtes à l’automne. Nous devrons plutôt améliorer génétiquement les espèces qui ont un bon rendement ici pour les aider à s’adapter aux conditions futures. Des publications à venir aborderont les efforts des chercheurs en ce sens.
La Beef Cattle Research Council est financée par l’Agence canadienne du prélèvement du bœuf. La BCRC collabore avec Agriculture et Agroalimentaire Canada, des groupes provinciaux de l’industrie du bœuf et les gouvernements pour faire progresser la recherche et le transfert technologique soutenant la vision de l’industrie canadienne du bœuf afin d’être reconnue comme un fournisseur de choix de bœuf, de bétail et de génétique sains et de qualité supérieure.
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